Faire équipe en couple pour l’éducation des enfants

Un duo aux commandes de la parentalité

Éduquer un enfant est une aventure merveilleuse… mais parfois semée d’embûches. Entre les différences d’opinions, les rythmes de vie effrénés et la fatigue du quotidien, il n’est pas rare que les parents se sentent désalignés sur la manière d’éduquer leurs enfants. Faut-il être plus strict ou plus souple ? Intervenir à deux ou laisser chacun gérer à sa façon ? Ces divergences, lorsqu’elles ne sont pas discutées, peuvent créer des tensions et, à terme, perturber le sentiment de sécurité de l’enfant.

Or, un couple parental uni offre à l’enfant un cadre stable et cohérent — un véritable pilier pour son développement affectif et émotionnel.

Quand les différences éducatives fragilisent le couple et l’enfant

Chaque parent arrive dans la parentalité avec son histoire, son éducation, ses valeurs et ses croyances. Ces bagages, souvent inconscients, influencent notre manière de réagir face à un comportement, une colère ou une difficulté de notre enfant. Comme le souligne John Bowlby, fondateur de la théorie de l’attachement, la sécurité affective de l’enfant repose en grande partie sur la cohérence et la stabilité des figures parentales.

Lorsque les parents ne sont pas alignés, l’enfant peut percevoir une faille et s’y engouffrer : il teste, manipule parfois sans le vouloir, et finit par se sentir perdu. Par exemple, un parent qui autorise les écrans pendant les repas alors que l’autre les interdit crée une dissonance : l’enfant ne sait plus ce qui est attendu de lui. À long terme, cette incohérence peut générer de l’anxiété, des troubles du comportement ou une perte de repères.

De leur côté, les parents peuvent entrer dans un cycle de reproches mutuels :– « Tu es trop laxiste ! »– « Et toi, tu es trop autoritaire ! »Ce désaccord éducatif devient alors une source de conflit conjugal. Selon les recherches de Gottman (2000), le désaccord sur l’éducation des enfants fait partie des premières causes de disputes dans le couple. Mais il n’est pas une fatalité : avec une communication claire et bienveillante, il est possible de transformer ces différences en complémentarité.

Conseils pratiques et solutions : construire une parentalité d’équipe

1. Clarifier ses valeurs éducatives

Avant de chercher à harmoniser vos pratiques, prenez un moment pour définir ce qui est essentiel pour chacun. Quelles sont les valeurs que vous souhaitez transmettre à vos enfants ? Le respect, l’autonomie, la politesse, la curiosité ?Cet échange, fait sans jugement, permet de mieux comprendre la logique de l’autre et d’éviter les conflits liés aux automatismes éducatifs hérités de son enfance.

2. Se présenter comme une équipe unie

L’enfant a besoin de sentir que ses parents forment une équipe soudée. Cela ne veut pas dire être d’accord sur tout, mais ne jamais se contredire devant lui. Si un désaccord survient, il vaut mieux reporter la discussion à un moment où l’enfant n’est pas présent.Vous pouvez ensuite revenir vers lui avec une position commune : « Papa et moi avons parlé, et nous avons décidé que… ». Ce type de phrase renforce la cohérence du cadre et apaise le climat familial.

3. Trouver un équilibre entre les différences

Dans beaucoup de couples, un parent incarne la structure, l’autre la douceur. Plutôt que de voir cela comme une opposition, il est intéressant d’y voir une complémentarité. L’enfant a besoin à la fois de sécurité et de réconfort, d’autorité et d’écoute.Selon les travaux de Diana Baumrind sur les styles parentaux, le style "autoritatif" — ferme mais bienveillant — est celui qui favorise le mieux le développement de l’enfant. Il s’agit d’un équilibre entre cadre et empathie, et il peut émerger lorsque les deux parents apprennent à conjuguer leurs forces.

4. Prendre soin du couple pour préserver la famille

On ne peut pas être de "bons coéquipiers" si l’on est épuisés ou frustrés. Prendre du temps à deux, parler d’autre chose que des enfants, cultiver des moments de complicité renforce la cohésion du couple… et donc la qualité du partenariat parental. Un parent apaisé communique mieux, prend de meilleures décisions et transmet à l’enfant un modèle d’adulte équilibré.

5. Consulter si nécessaire

Si les désaccords deviennent trop fréquents ou que la communication semble bloquée, il peut être utile de consulter un psychologue familial. Cet espace neutre permet de rétablir le dialogue, de mieux comprendre les besoins de chacun et de trouver un terrain d’entente durable.

Conclusion : deux parents, une même équipe

Faire équipe en couple pour l’éducation des enfants, c’est avant tout apprendre à conjuguer les différences, à écouter, à ajuster et à communiquer. Ce n’est pas un idéal figé, mais un travail quotidien d’équilibre et de respect mutuel.

L’unité parentale ne repose pas sur une parfaite symétrie, mais sur la confiance et la cohérence.

En vous soutenant l’un l’autre, vous offrez à votre enfant le plus beau cadeau : la stabilité d’un cadre sécurisant et l’exemple d’une relation fondée sur l’amour et la coopération.

Et souvenez-vous : éduquer un enfant, ce n’est pas être d’accord sur tout — c’est avancer ensemble, dans la même direction.

Ressources pour aller plus loin

• John Gottman (2000) – The Seven Principles for Making Marriage Work. Harmony Books.

• Diana Baumrind (1991) – Parenting Styles and Adolescent Development. In Encyclopedia of Adolescence.

• Donald Winnicott (1965) – The Family and Individual Development. Tavistock Publications.

• Isabelle Filliozat (2013) – Il n’y a pas de parent parfait. JC Lattès.

• Catherine Gueguen (2014) – Pour une enfance heureuse : repenser l’éducation à la lumière des dernières découvertes sur le cerveau. Pocket.